Association Patrimoine Matériel et Immatériel de l’Hôpital-Beaulieu, Issendolus et Ste Fleur

GALIOTE DE STE ANNE DE GOURDON, GINOUILLAC, VAILLAC
(1588-1618)

Pour comprendre le rôle de Galiote, il est nécessaire de rappeler quelques éléments de contexte. La Réforme protestante et les guerres de religion ont engendré de profondes divisions.

En cette fin de 16e siècle, l’Eglise s’est repositionnée avec le Concile de Trente et propose une Contre-Réforme qui précise les dogmes de la foi catholique, redonne aux évêques un rôle central dans la conduite de leur diocèse, promeut la formation et les séminaires pour mieux s’opposer à l’hérésie et établit des modes de vie pour les religieux plus conformes à l’Evangile et plus exemplaires.

L’époque sera marquée par l’avènement de grands saints comme St François de Salle, St Vincent de Paul et à Cahors par le Bienheureux Alain de Solminhiac.
Galiote naît au château de Vaillac près de Labastide-Murat le 5 novembre 1588. Elle une des vingt-trois enfants de Louis de Vaillac, gouverneur de Bordeaux et d’Anne de Montberon. Parmi ses frères, on trouve un évêque de Tulle et abbé de Rocamadour et le P. Bernard de St Joseph, carme déchaussé qui introduisit son ordre en France en fondant de nombreux monastères. Ces deux illustres personnages aideront Galiote lorsqu’elle se retrouvera seule face aux difficultés. Le prénom de Galiote rend hommage à son cousin Galiot (1465-1546) qui rendit célèbre ses armes en s’illustrant à la bataille de Marignan, devenant maître de l’Artillerie des rois François 1er et Louis XIII,  Grand Ecuyer de France, gouverneur du Languedoc et grand amateur d’art. Il rebâtit le château d’Assier dans un style Renaissance influencé par la culture transalpine.

L’enfance.
Anne de Montberon, destine sa fille à Dieu dès sa naissance, et veut qu’elle grandisse au monastère de L’Hôpital-Beaulieu à Issendolus, dans lequel l’influence des Vaillac était déjà bien présente. Les troupes du comte de Vaillac avaient contribué plusieurs fois à repousser les pillards et des profanateurs. Bref, à L’Hôpital-Beaulieu, les de Vaillac se sentaient un peu chez eux ! Dès l’âge de cinq mois, Galiote est envoyée avec sa nourrice dans la maison d’éducation du célèbre monastère. De 1236 à 1792, ce couvent, relevant des Hospitaliers de St Jean de Jérusalem (devenu Ordre de Malte) réunit des représentantes de la noblesse locale sous la conduite de prieures issues de trois grandes familles du Quercy, les Thémines, les Castelnau et les Gourdon-Genouillac-Vaillac. Tout dans cette jeune enfant, jusqu’à ses amusements présageaient la vie religieuse. A sept ans, elle avait déjà une grande maturité, se signalait par son humilité, sa patience et son obéissance malgré son rang, et reçut l’habit comme novice de l’Ordre des Hospitaliers. Dans sa onzième année, son père, avec l’accord de la prieure, la pousse à anticiper ses vœux de moniale. Dans sa douzième année, elle souhaite quitter L’Hôpital où elle juge que le mode de vie est trop relâché. Elle souhaite rejoindre le couvent des Feuillantines de Toulouse dont elle est informée de la ferveur autour d’une pratique stricte de règle. Elle cède aux menaces de son père et se rattrape en décidant de s’imposer une règle stricte de prières, jeûnes et mortifications. Contrairement à ses consœurs, elle ne rentre que très rarement dans sa famille pour respecter une clôture qui n’existe plus.

Comme Ste Fleur qu’elle vénère, elle a une grande charité vis-à-vis des pauvres et n’hésite pas à se priver pour subvenir aux besoins des malheureux. Seule, mais ferme dans sa persévérance, son témoignage de vie suscite un grand respect de son entourage. Elle n’a pas quinze ans lorsqu’en 1597, elle est choisie comme coadjutrice du monastère à la demande de la prieure Antoinette de Beaumont qui est âgée. Cela renforce sa volonté de rester dans la rigueur de la règle comme témoignage pour sa communauté. Respectueuse de sa charge, elle met beaucoup de zèle à la gestion du couvent et de ses personnels.

Tentative de mise en place d’une réforme.
En 1608, Galiote est nommée prieure du couvent des Fieux, près de Miers, relevant aussi de l’Ordre de Malte.  Ce monastère, désert et solitaire, servit par quelques sœurs, est une aubaine pour Galiote qui ne souhaite que vie de prière, solitude et silence dans la pénitence. Ces années aux Fieux furent un havre d’idéal monacal tout en accueillant les malheureux. Elle leur donnait tant qu’elle se passait de nourriture, ce qui affecta sa santé. En 1611, elle revient à L’Hôpital-Beaulieu et contribue à l’unification des monastères de L’Hôpital et des Fieux. En 1613, le monastère reçoit la visite d’inspection de l’Ordre, ce qui n’est pas arrivé depuis  cinquante-quatre ans ! Le frère Nabérat, visiteur des prieurés de Provence et d’Auvergne, constatant le relâchement au sein de la communauté, souhaite réformer la vie des moniales et instituer une clôture perpétuelle, suivant la tendance issue du concile. Galiote est chargée d’implanter la règle de Ste Ursule de Malte.  Avec les religieuses qui soutiennent ces réformes, Galiote renouvelle ses vœux et fait le vœu de clôture perpétuelle. Cet engagement va diviser gravement la communauté entre celles qui suivent la prieure âgée et ne voulaient pas entendre parler de changements et celles qui suivent la coadjutrice qui veut engager son couvent dans une règle plus austère. Dans toute la contrée, ce fut une clameur générale contre une jeune fille de 25 ans qui, par ses prétentions imprudentes de réforme, pouvait compromettre l’existence d’une maison illustre. Galiote resta inébranlable même face à son père qui la menaçait. Afin de faire l’expérience d’une vie régulière bien vécue, elle part passer quelques temps au monastère Ste Claire de Tulle. Elle laissera une très forte impression de sainteté et en reviendra affermie dans son intention.

Un des différents entre les religieuses réformées et celles de la règle traditionnelle porte sur la communauté de biens. La règle de Malte oblige aux trois vœux de chasteté, pauvreté et obéissance et par conséquent ôte le droit de propriété, mais leur permet des revenus et biens en particulier sans les obliger à les mettre en commun comme le voulait Galiote. Elle traqua le langage médisant, destructeur et inutile au sein de sa communauté. Elle renforça la pratique de l’obéissance et entreprit la construction du mur de clôture dont elle ne vit pas la fin. Enfin, elle introduisit la psalmodie des psaumes. A ses opposantes, elle usait de persuasion par l’exemple, l’exhortation et les conseils. Elle s’inquiétait de leurs conditions de vie et de leur santé notamment la nourriture et le sommeil en allant les servir à table, les visiter la nuit ou soigner les sœurs atteintes de maladie contagieuse. Cependant, l’austérité de sa vie et l’attention portée à sa charge finirent par l’épuiser et la rendre malade. Mal conseillée, elle va prendre les eaux mais son état empire. Le chemin de retour à L’Hôpital-Beaulieu est un calvaire, avec deux longs arrêts où on la croit morte. Elle finit par rejoindre son monastère, mais ne sortira pratiquement plus de l’infirmerie, ce qui ne l’empêche pas de continuer sa réforme en éditant des statuts qu’elle fait observer avec soin. Sa mort annoncée prochainement enclenche une cabale quant à sa succession. On lui demande de résigner au profit de personnes qui lui avait été contraire. Malgré les pressions, elle refuse. Elle meurt en 1618 à 29 ans, le jour de la saint Jean-Baptiste, patron de l’Ordre des Hospitaliers. Elle ne vivra pas la mise en place de sa réforme qui sera parachevée avec bien des péripéties, par sa nièce Galiote 2 qui dirigera le monastère de 1634 à 1702.